Aujourd'hui, j'ai le plaisir de rencontrer Fabienne Pouyadou, directrice des partenariats et de la communication de CARE France, une ONG internationale majeure engagée pour diminuer l'extrême pauvreté dans le monde. Ses principes d'action sont de construire, transformer, responsabiliser et rendre autonomes les plus démunis, tout en protégeant leurs droits économiques et sociaux. En 2011 CARE est intervenu auprès de 122 millions de personnes dans le monde à travers plus de 1000 projets dans 84 pays différents.
Patrice Laubignat : « Avant de prendre la direction des partenariats de CARE France, vous avez notamment travaillé en agence chez Excel-TBWA spécialiste du marketing de l’engagement, quelle est votre mission prioritaire pour CARE ? »
Fabienne Pouyadou : « L’une de mes premières missions et de mon équipe est le fundraising, car comme toute ONG nous devons financer nos interventions sur le terrain en partie par des fonds privés. Ma mission consiste également à créer des partenariats avec de grandes entreprises françaises pour les accompagner dans leur politique de responsabilité sociale (RSE) dans les pays du sud. CARE, a pour mission de lutter dans le monde contre l’extrême pauvreté et mène plus de 1000 projets par an. Nous n’intervenons pas pour distribuer des biens ou apporter des services vitaux (hormis dans les cas d’urgence humanitaires) mais pour susciter un développement et un impact à long terme, CARE mobilise les communautés, et en particulier les femmes, pour qu’elles soient autonomes et actrices du changement. En conséquence, notre mission s’inscrit dans du long terme et nos partenariats aussi. CARE a toujours été moteur dans la collaboration avec les entreprises. Nous pensons qu’il est possible d’allier bénéfice économique et bénéfice social pour les plus pauvres. Nous avons aujourd’hui près de 20 partenaires entreprises engagés à nos côtés, et cela représente près de 25% de notre budget annuel.»
PL : « Pourquoi considérez-vous les entreprises qui font du mécénat avec CARE France comme des partenaires ? »
FP : « La plupart des entreprises avec lesquelles nous travaillons, cherchent une implication durable dans un programme. Que ce soit dans le financement de projets de développement qui prennent du temps, mais aussi lorsqu’il s’agit de travailler sur leurs propres impacts dans les pays du sud. Nous travaillons ensemble dès le départ pour construire le partenariat, évaluer les enjeux pour l’entreprise, les moyens disponibles au siège ou localement et définir le plan d’action adapté. Ainsi nous avons travaillé depuis près de 10 ans avec Lafarge sur une politique VIH pour leurs salariés, l’accès au ciment pour les plus pauvres ou encore les relations avec les communautés locales. Ce type d’actions nécessite du temps, plusieurs années parfois. »
PL : « Vous insistez également sur l’implication des salariés de l’entreprise partenaire. Comment cela se concrétise-t-il ? »
FB : « C’est en réalité, une demande de plus en plus forte de nos partenaires. La communication du mécénat est essentielle à l’interne pour les entreprises. Si les entreprises sont davantage « engagées » d’un point de vue sociétal et même humanitaire, on le doit aussi à une prise de conscience, voir la demande des équipes en interne. Cette communication en interne dans les entreprises a un caractère pédagogique très important. C’est notre rôle de sensibiliser les collaborateurs aux problématiques du développement et de l’aide humanitaire et de leur faire prendre conscience parfois que cela ne se résume pas à envoyer des stylos ou des livres usagés pour une école en Afrique. Mais les collaborateurs de nos partenaires savent aussi se mobiliser de façon extraordinaire notamment en cas d’urgence ou lors d’événement sportifs à notre profit.»
PL : « Justement quelle est votre appréciation de la connaissance du partenariat Entreprise/ONG dans l’entreprise en France ? »
FB : « Il me semble qu’il y a encore beaucoup à faire, il reste beaucoup de préjugés sur les ONGs et d’incompréhension de nos enjeux et contraintes. C’est pourquoi j’interviens autant que possible lors de conférences pour expliquer que secteur privé et ONG ont intérêt à travailler ensemble. Je m’appuie beaucoup sur la démonstration par des cas concrets de nos partenariats. C’est aussi une façon de faire connaitre CARE et nos actions car nous souffrons en France d’un déficit de notoriété. Nous sommes également en train de réaliser une étude auprès de nos partenaires afin de mesurer la qualité de notre collaboration et d’avoir leur feedback et leurs attentes. Cela devrait nous fournir quelques pistes pour l’avenir. »
PL : « Pour conclure, quel partenariat exemplaire vous a marqué récemment ? »
FP : « Ils sont tous exemplaires et différents, mais peut-être le dernier partenariat signé avec le groupe AXA. Il est très ambitieux et d’envergure internationale. Il est centré sur la réduction des risques pour les populations les plus pauvres, un thème qui fait sens pour AXA dans son métier d’assureur et il implique l’ensemble du groupe que ce soit au siège mais aussi dans les filiales. C’est également le premier partenariat de cette ampleur pour lequel nous avons ensemble défini une méthodologie d’évaluation qui nous permettra d’évaluer de façon assez rationnelle la réussite de cette collaboration dans 3 ans et je l’espère de la renouveler ! »
PL : "Merci Fabienne pour cet éclairage sur votre métier et votre engagement."
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